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13 mars 2010 6 13 /03 /mars /2010 16:01
Mon professeur, Valdimir Jankélévitch, fut tout de même assez ambivalent par raport au pardon. Il n'a jamais pardonné, pour sa part , aux nazis, pas même au peuple allemand!

[L'IMPRESCRIPTIBLE]

 «  L'extermination des Juifs ne fut pas, comme les massacres d'Arméniens, une flambée de violences : elle a été doctrinalement fondée, philosophiquement expliquée, méthodiquement préparée, systématiquement perpétrée par les doctrinaires les plus pédants qui aient jamais existé ; elle répond à une intention exterminatrice délibérément et longuement mûrie ; elle est l'application d'une théorie dogmatique qui existe encore et qui s'appelle l'antisémitisme. Aussi dirions-nous volontiers, en renversant les termes de la prière que Jésus adresse à Dieu dans l'Évangile selon saint Luc : Seigneur, ne leur pardonnez pas, car ils savent ce qu'ils font ».

[…]

 Le massacre minutieux, administratif,  scientifique, métaphysique de six millions de Juifs n'est pas un malheur « en soi », ni un cataclysme naturel : c'est un crime dont un peuple entier est plus ou moins responsable, et ce peuple, après tout, a un nom, et il n'y a pas de raison de ne pas dire le nom de ce peuple, ni de céder à l'étrange pudeur qui interdit aujourd'hui de le prononcer. Un crime qui fut perpétré au nom de la supériorité germanique engage la responsabilité nationale de tous les Allemands. Les deux Allemagnes, héritières de l'État national-socialiste, ont des comptes à rendre, c'est un fait. La monstrueuse machine à broyer les enfants, à détruire les Juifs, les Slaves, les résistants par centaines de milliers ne pouvait fonctionner que grâce à d'innombrables complicités, et dans le silence complaisant de tous ; les bourreaux torturaient, et le menu fretin des petits criminels aidait ou ricanait. Hélas ! du mécanicien des convois qui menaient les déportés à la mort jusqu'au misérable bureaucrate qui tenait les bordereaux des victimes, - il y a bien peu d'innocents parmi ces millions d'Allemands muets ou complices. Dire qu'il faudra longtemps encore pour découvrir toutes les complexes ramifications du crime, ce n'est pas dire que les Allemands soient responsables collectivement ou en tant qu'Allemands : il y avait des démocrates allemands dans les camps, et nous saluons bien bas cette élite perdue dans la masse vociférante des autres ; de tous les autres. On ne peut passer ici sous silence le geste bouleversant du chancelier Brandt (devant le mémorial du ghetto de Varsovie). Et d'autre part le courage admirable de Mme Beate Klarsfeld prouve que l'élite de la jeune génération allemande a su relayer l'élite dont nous parlons. En dehors de ces élites, un peuple entier a été, de près ou de loin, associé à l'entreprise de la gigantesque extermination ; un peuple unanimement groupé autour de son chef, qu'il avait maintes fois plébiscité avec frénésie, à qui il confirma tant de fois son adhésion enthousiaste, en qui il se reconnaissait. Nous avons encore dans l'oreille les affreux hurlements des congrès de Nuremberg. Qu'un peuple débonnaire ait pu devenir ce peuple de chiens enragés, voilà un sujet inépuisable de perplexité et de stupéfaction. On nous reprochera de comparer ces malfaiteurs à des chiens ? Je l'avoue en effet : la comparaison est injurieuse pour les chiens. Des chiens n'auraient pas inventé les fours crématoires, ni pensé à faire des piqûres de phénol dans le coeur des petits enfants… »

 In L’imprescriptible.
Pardonner ? Dans l’honneur et le dignité
(Seuil, 1986)

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12 mars 2010 5 12 /03 /mars /2010 18:41

 Grâce à la littérature, on peut découvrir des réalités que l’on pouvait croire inexprimables :

 

 « La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent réellement vécue, c’est la littérature ; cette vie qui, en un sens, habite à chaque instant chez tous les hommes aussi bien que chez l’artiste. Mais ils ne la voient pas, parce qu’ils ne cherchent pas à l’éclaircir. Et ainsi leur passé est encombré d’innombrables clichés qui restent inutiles par ce que l’intelligence ne les a pas « développés ». Notre vie,  et aussi la vie des autres. Le style, pour l’écrivain, aussi bien que la couleur pour le peintre, es tune question non de technique, mais de vision. Il est la révélation, qui serait impossible par des moyens directs et conscients, de la différence qualitative qu’il y a dans la façon dont nous apparaît le monde, différence qui, s’il n’y  avait pas l’art, resterait le secret éternel de chacun. Par l’art seulement nous pouvons sortir de nous, savoir ce que voit un autre de cet univers qui n’est pas le même que le nôtre, et dont les paysages nous seraient restés aussi inconnus que ceux qu’il peut y avoir dans la lune. Grâce à l’art, au lieu de voir un seul monde, le nôtre, nous voyons le monde se démultiplier, et,  autant qu’il y a d’artistes originaux, autant nous avons de mondes à notre disposition, plus différents les uns des autres que ceux qui roulent à l’infini, et, bien des siècles après que s’est éteint le foyer dont il émanait, qu’il s’appelât Rembrandt ou Vermeer, nous envoient encore leur rayon spécial » .
 Marcel Proust

 Recherche du temps perdu Tome III , Pléiade, p 895

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10 mars 2010 3 10 /03 /mars /2010 14:13

Semaine de la francophonie lienici

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9 mars 2010 2 09 /03 /mars /2010 15:23
Tous ceux qui résident à Paris pourront peut-être assister aux conférences de mon amie et excellente collaboratrice Aurélie Ledoux:
 L'art est-il politique?
 La prochaine a lieu le 18 mars, Paris XI.
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9 mars 2010 2 09 /03 /mars /2010 12:23
Par Christine Baron , maître de conférence à Paris III:

« La grande absente du débat sur l'identité nationale fut sans doute la langue, et plus encore la

langue écrite et la manière dont nous la pratiquons (ou la malmenons) aujourd'hui. Comment promouvoir en 2010 une «défense de l'orthographe» ? L expression a immédiatement un côté combat d'arrière-garde qui fait reculer le lecteur. Orthos, graphein: écrire droit, selon la loi; l'étymologie marque d'emblée la normativité du mot. Une anecdote illustrera le préjugé dont souffre l'orthographe. Jeune professeure, je suis sollicitée en 1990 pour organiser des tournois pédagogiques sur ce thème. Je me heurte alors à l'hostilité d'un collègue qui qualifie ma démarche de «rétrograde», «ringarde», et qui, coup de grâce symbolique, observe que c'est bien «un truc de nana». A une masculinité libre et créative qui autoriserait la transgression, s'opposerait ainsi une féminité docile, grégaire et respectueuse de la loi la plus bête qui soit, l'orthographe étant, comme chacun sait «la science des imbéciles» ou encore un vieux truc «scolaire» qui sépare l'élève brillant (entendez, favorisé socialement) et le soigneux tâcheron, supposé dénué d'imagination. Un autre récit dont on peut tirer une leçon proche est extrait d'un manuel de savoir-vivre des années 60. Un jeune homme déclare sa flamme à une jeune fille et lui tend une lettre dont le «Je vou ême bocou» déclenche l'hilarité de la destinataire. Il serait quand même utile de connaître l'orthographe «parce qu'il est toujours désagréable de faire rire de soi», commente l'auteur. Le problème demeure insoluble : s'intéresser à l'orthographe est régressif, mais l'ignorer demeure ridicule.

Raymond Queneau fut d'abord un détracteur de l'orthographe. Convaincu, dans les années 50, de l'existence d'un fossé infranchissable entre langage académique et parler populaire, il plaide dans Bâtons, chiffres et lettres pour une réforme phonétique de la langue écrite, montrant que l'attachement à l'orthographe relève d'une connivence entre initiés qui défend un savoir confisqué parfois sans justification scientifique. Quelques années plus tard, il constate que l'histoire lui a donné tort. Le parler populaire a en effet disparu au profit d'une uniformisation de la langue calquée sur le modèle écrit, un français standard véhiculé par la radio, puis la télévision. Bouleverser les usages orthographiques aurait d'autant moins de sens que, par ailleurs, d'elles-mêmes, les règles se plient aux usages, ce que soulignait, il y a quelques années, Fernand Grevisse soucieux d'intégrer au célèbre Bon usage les changements de la langue. Cette remarque est l'occasion d'examiner quelques préjugés anti-orthographiques : supprimer l'orthographe, ce serait gagner du temps ; ce serait gagner en clarté ; ce serait abolir un marqueur social ; supprimer l'orthographe est sans conséquence car aujourd'hui la communication orale prend le pas sur l'écrit; enfin, seul le sens compterait, et la suppression de l'orthographe n'y changerait rien. Gain de temps? Peut-être pour celui qui écrit (par exemple dans les SMS), mais pour le lecteur, le temps consacré à éliminer les fausses pistes et à élaborer des inférences s'allonge en proportion. En effet, les mots correspondent non seulement à des vocables mais à des fonctions grammaticales différenciées qui articulent le sens ; temps, modes, statut des mots dépendent de la manière dont ils sont écrits. L orthographe serait un marqueur social? Faux, même s'il est plus facile l'éradique -une dysorthographie si on habite Passy. La compétence orthographique transcende classes sociales, milieux, critères économiques. Elle dépend de la formation initiale d'où l'importance d'une homogénéité des apprentissages scolaires. Disparition de l'écrit? Elle est prophétisée depuis les années 1969 - 1970. En vain. Curriculum vitae, lettre de motivation, devoir remis, mail, mot laissé dans un secrétariat, tout premier contact est écrit. Enfin, le sens est nécessairement affecté par l'orthographe. Une blague d'écolier en témoigne. Dans une dictée, un enfant note à la place de la phrase prévue «Les poules sortaient dès qu'on leur avait ouvert la porte» l'énoncé suivant : «Les poules sortaient; des cons leur avaient ouvert la porte".  […]

 

 

 

 Malheureusement , j’ai perdu la suite…

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8 février 2010 1 08 /02 /février /2010 15:39
Extrait d'un article de Libération paru ce matin ("Les dérapages de la gauche sur le voile") à propos de Djemila Benabib, auteur de "Ma vie à contre-Coran", par Annie Sugier, Présidente de la ligue internationale du droit des femmes:


"Cette jeune femme, dans une lettre (du 13 novembre 2009) adressée au président de la mission sur le voile intégral, écrit : «Sachez qu'il n'y a rien dans ma culture qui me prédestine à être éclipsée sous un linceul, emblème ostentatoire de différence. Rien qui me prédétermine à accepter le triomphe de l'idiot, du sot et du lâche, surtout si on érige le médiocre en juge. Rien qui prépare mon sexe à être charcuté sans que ma chair en suffoque.
Rien qui me prédestine à apprivoiser le fouet ou l'aiguillon. Rien qui me voue à répudier la beauté et le plaisir. Rien qui me prédispose à recevoir la froideur de la lame rouillée sur ma gorge. Et si c'était le cas, je renierais sans remords ni regret le ventre de ma mère, la caresse de mon père et le soleil qui m'a vu grandir. »
 Ce que nous demandons aux dirigeants du NPA, puisqu'ils se complaisent dans un aveuglement complice, c'est qu'au moins ils cessent d'utiliser des mots dont ils ignorent le sens : féminisme, laïcité, égalité, émancipation. Et sans doute aussi, liberté et fraternité".
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7 janvier 2010 4 07 /01 /janvier /2010 20:35
Luc e soir dans le Monde,  à propos des menaces de fermeture des salles d'art et d'essai:
 "Tout ce qui dégrade la culture raccorucit les chemins qui ménent à la servitude"  Alvert Camus
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28 novembre 2009 6 28 /11 /novembre /2009 22:52

 

 « Idéologie et terreur »  est le titre du dernier chapitre des "Origines du totalitarisme". Toute idéologie est totalitaire par nature, pour Hannah Arendt. Mais ce sont les deux grands totalitarismes du XX ième siècle qui ont exploité plus  systématiquement  cette dimension d’emblée terrorisante de la logique. 

 

« Une idéologie est très littéralement ce que son nom indique : elle est la logique d’une idée. Son objet est l’histoire, à quoi l’ « idée est appliquée ; le résultat de cette application n’est pas un ensemble d’énoncés sur quelque chose qui est, mais le déploiement d’un processus perpétuellement changeant. L’idéologie traite l’enchaînement des événements comme s’il obéissait à la même « loi » que l’exposition de son « idée ». Si les idéologies prétendent connaître les mystères du procès historique tout entier, les secrets du passé, les dédales du présent, es incertitudes de l’avenir, c’est à cause de la logique inhérente à leurs idées respectives …

Toutes les idéologies contiennent des éléments totalitaires, mais qui ne sont pleinement développés que par les mouvements totalitaires, et cela crée l’impression trompeuse que seuls le racisme et le communisme ont un caractère totalitaire. En vérité, c’est plutôt la nature réelle de toutes les idéologies qui s’est révélée seulement dans le rôle que l’idéologie joue dans l’appareil de domination totalitaire ». Idéologie et terreur in Le système totalitaire, Seuil, pp 216-219.

 

 

 

 (Le caractère totalitaire en puissance de toute idéologie avait déjà été mis en lumière par Tocqueville. Voir sur le webpédagogique le choix de textes de Tocqueville, le texte 6)

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8 novembre 2009 7 08 /11 /novembre /2009 14:53
Vous ne manquerez pas la très bonne synthèse de Antoine de Baecque hier dans le Monde ( p 20)

" Nous préconisons [un cinéma] optimiste, tourné vers l'avenir, exaltant l'effort, la solidarité, la marche vers uen société meilleure" Maurice Thorez, secrétaire général  du PC français,1949.
 L'article aborde le lien entre cinéma et communisme, et plsu généralement entre cinéma et propagande.
 Camera, faucille et marteau
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6 novembre 2009 5 06 /11 /novembre /2009 14:16
Vous trouverez deux dossiers, pour une introduction à ces thèmes, ici
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