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22 octobre 2012 1 22 /10 /octobre /2012 19:37

 Pour le biologiste Richard Dawkins, l’argument du pari de Pascal relève de la supercherie. Voici comment il l’explique :

 

« Le grand mathématicien français Blaise Pascal a calculé que même si Dieu a fort peu de chances d'exister, cela coûte beaucoup plus cher si vous perdez votre pari. Il vaut mieux croire en Dieu car si vous gagnez votre pari, vous êtes bien placé pour gagner la félicité éternelle, et si vous perdez, cela ne changera absolument rien. En revanche, si vous ne croyez pas en Dieu et que vous perdez votre pari, vous y gagnez la damnation éternelle, alors que si vous perdez, cela ne changera rien. Tout compte fait, le choix est simple : croyez en Dieu. Mais il y a clairement une faille dans cet argument. La foi ne relève pas d'une décision comme on adopte une ligne de conduite. En tout cas, je ne peux pas en décider au titre d'un acte volontaire.

 Je peux décider d'aller à l'église, de réciter le Symbole de Nicée, jurer sur toute une pile de Bibles que je crois chacun des mots qu'elles contiennent. Mais si je n'y crois pas, rien de tout cela ne m'y fera croire vraiment. Le pari de Pascal ne pourra jamais être, qu'un argument pour feindre de croire en Dieu. Et vous auriez intérêt à ce que le Dieu auquel vous dites croire ne soit pas du genre omniscient, sinon il verrait clair à travers votre supercherie.

Mais, de toute façon, pourquoi acceptons-nous si facilement l'idée que si l'on veut plaire à Dieu, ce qu'il faut, c'est croire en lui ? Qu'y a-t-il de si particulier dans le fait de croire ? Est-ce que Dieu ne va pas récompenser de la même façon la gentillesse, la générosité ou l'humilité ? ou la sincérité ? Et si Dieu était un scientifique pour qui la vertu suprême est de chercher honnêtement la vérité ? Au reste, le créateur de l'univers ne devrait-il pas nécessairement être un scientifique ? On a demandé un jour à Bertrand Russell ce qu'il dirait si, à sa mort, il se trouvait face à face avec Dieu qui lui demanderait pourquoi il n'a pas cru en lui. « Pas assez de preuves, Seigneur, pas assez de preuves », telle fut la réponse (j'ai failli ajouter immortelle) de Russell. Est-ce que Dieu n'aurait pas beaucoup plus de considérations pour Russell et son scepticisme courageux (sans parler du pacifisme courageux qui lui a valu la prison lors de la Première Guerre mondiale), que pour Pascal et ses sordides spéculations sur les risques ? Et puis, comme nous ne pouvons pas savoir de quel côté Dieu pencherait, nous n'avons pas besoin de le savoir pour réfuter le pari de Pascal : c'est d'un pari qu'il s'agit, ne l'oubliez pas, et Pascal ne prétendait pas que son pari avait une cote très élevée. Est-ce que vous seriez prêt à parier sur un Dieu qui préférerait un simulacre de foi malhonnête (voire une foi honnête) à un scepticisme honnête ?

Et puis, supposez que vous mourez et que le dieu que vous rencontrez face à face se révèle être Baal, qui est exactement aussi jaloux que son vieux rival Yahvé tel qu'on nous le décrit. Est-ce que Pascal n'aurait pas mieux fait de ne parier sur aucun dieu que sur le mauvais dieu ? De fait, est-ce que le simple nombre de dieux et de déesses potentiels sur lesquels on pourrait parier ne fausse pas toute la logique de Pascal ? Il plaisantait probablement quand il a proposé son pari, comme je plaisante quand je le réfute. J'ai cependant rencontré des personnes, par exemple dans les questions en fin de conférence, qui proposaient sérieusement le pari de Pascal comme un argument pour croire en Dieu. Voilà pourquoi j'ai jugé bon d'en parler rapidement ».

Richard Dawkins, Pour en finir avec Dieu, 2006, pp 113-114 , ED. R. Laffont

 

 

 

 

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22 octobre 2012 1 22 /10 /octobre /2012 19:33

Une preuve de l’existence de Dieu

 

 Descartes vient d’abandonner  toutes ses anciennes opinions. Il ne possède plus  désormais qu’une seule certitude : « je pense, donc je suis ». Comment, partant de là, établir l’existence de Dieu ? Le  fait de douter  est assurément  une imperfection.   Mais  la notion d’imperfection ne peut  se concevoir indépendamment  de l’idée de perfection :

« En suite de quoi, faisant réflexion sur ce que je doutais, et que, par conséquent, mon être n’était pas tout parfait, car je voyais clairement que c’était une plus grande perfection de connaître que de douter, je m’avisai de chercher d’où j’avais appris à penser à quelque chose de plus parfait que je n’étais ; et je connus évidemment que ce devait être de quelque nature  qui fût en effet plus parfaite. Pour ce qui est des pensées que j’avais de plusieurs autres choses hors de moi, comme du ciel, de la terre, de la lumière, de la chaleur et de mille autres, je n’étais point tant en peine de savoir d’où elles venaient, à cause que, ne remarquant rien en elles qui me semblât supérieures à moi, je pouvais croire que, si elles étaient vraies, c’étaient des dépendances de ma nature, en tant qu’elle avait quelque perfection ; et si elles ne l’étaient pas, que je les tenais du néant, c’est-à-dire qu’elles étaient en moi pour ce que j’avais du défaut. Mais ce ne pouvait être le même 1 de l’idée d’un être plus parfait que le mien ; car, de la tenir du néant, c’était chose manifestement impossible ; et pour ce qu’il n’y a pas moins de répugnance que le plus parfait soit une suite et une dépendance du moins parfait, qu’il y en a que de rien procède  quelque chose, je ne la pouvais tenir non plus de moi-même ».

 

René Descartes, Discours de la méthode (1636), Quatrième partie, Ed. Gallimard, Coll. « Bibliothèque de la Pléiade »,  1953, pp148-149.

Note :

 1. La même chose

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22 octobre 2012 1 22 /10 /octobre /2012 19:28

 

Ceci est l’une des plus célèbres preuves de l’existence de Dieu, dite « preuve ontologique » (preuve par l’être). Seul un fou, selon le philosophe,  peut penser que  « l’être le plus grand que l’on  puisse concevoir… n’est pas »  :

 

 Qu'on ne peut penser qu'il n'est pas.

« Lequel, du reste, est de manière si véritable, qu'on ne peut même pas penser qu'il n'est pas .• Car on peut penser que quelque chose est qu'on ne peut penser ne pas être, ce qui est plus grand que quelque chose qu'on peut penser ne pas être. Et donc, si l'on peut penser ne pas être ce qui est tel que rien ne se peut penser de plus grand, cela même qui est ce qui est tel que rien ne se peut penser de plus grand n'est pas ce qui est tel que rien ne se peut penser de plus grand, ce qui ne peut pas convenir. Il y a donc quelque chose de tel que rien ne se peut penser de plus grand qui est si véritablement qu'on ne peut même pas penser qu'il n'est pas.

Et c'est ce que tu es, Seigneur notre Dieu. Tu es donc si véritablement, Seigneur mon Dieu, qu'on ne peut même pas penser que tu n'es pas ; et à juste titre. Car s'il se trouvait un esprit capable de penser quelque chose de meilleur que toi, la créature dépasserait le créateur, et elle jugerait le créateur ; ce qui, assurément, est absurde. Et certes, de toute chose qui est, à part toi et toi seul, on peut penser qu'elle n'est pas. C'est donc toi, entre tout, qui as l'être de la manière la plus véritable, et donc la plus grande, car tout ce qui est autre n'est pas si véritablement, et par là a moins d'être. Pourquoi donc l'insensé a-t-il dit dans son coeur

Dieu n'est pas », alors qu'il est si évident pour l'esprit rationnel que tu es, entre tout, ce qui est de la manière la plus grande ? pourquoi, sinon parce qu'il est fou et insensé ? »

     Saint Anselme, Prologium (1078), chapitre III, Trad. Bernard Pautrat, G.F.Flammarion, 1992, pp 44-45.    

 

 

 

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20 octobre 2012 6 20 /10 /octobre /2012 12:33

 

 

 

DISCOURS DE MÉTAPHYSIQUE

1 .  I. De la perfection divine et que Dieu fait tout de la manière la plus souhaitable.     

La notion de Dieu  la plus reçue et la plus significative que nous ayons, est assez bien exprimée en ces termes que Dieu est un être  absolument parfait, mais on n'en considère pas assez les suites; et pour y entrer plus avant, il est à propos de remarquer  qu'il y a dans la nature plusieurs perfections TOUTES DIFFERENTES, que Dieu  Ies possède toutes ensemble,  et  que chacune LUI APPAR TIENT au plus souverain degré.

 

Il faut  connaitre aussi ce que c'est que perfection, dont voici  une marque assez  sûre, savoir que les formes ou natures qui  ne sont pas susceptibles du dernier  degré, ne sont pas des perfections, comme par exemple, la nature du nombre ou de la figure. Car le nombre le plus grand de tous, [ou bien le nombre de tous les nombres aussi bien que la plus grande de toutes les figures, impliquent contradiction, mais la plus grande science et la toute puissance. N'ENFERMENT POINT

 D' IMPOSSIBILITE  (a). Par conséquent, LA PUISSANCE ET LA SCIENCE Sont des perfections, et, EN TANT QU'ELLES appartiennent à Dieu, ELLES N'ONT POINT DE BORNES.

D'où il s'en suit que Dieu possédant la sagesse suprême et infinie agit de la manière la plus parfaite, non seulement au sens métaphysique, mais encor moralement parlant, et tu qu'on peut exprimer ainsi à notre égard, que plus on sera éclairé et informé des ouvrages de Dieu, plus on sera disposé à les trouver excellents  et entièrement  satisfaisant  à tout ce qu'on aurait pu  souhaiter.

 

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20 octobre 2012 6 20 /10 /octobre /2012 11:37

C'était le sujet de Répliques ce matin...

 je ne suis pas certaine d'avoir tout compris!

 

http://www.franceculture.fr/emission-repliques

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18 octobre 2012 4 18 /10 /octobre /2012 17:53

 

Peur-de-la-science.jpg

 

C'est probablement un sujet de ce type qui vous attend!

 

"La peur n'empêche pas le danger, donc n'ayons pas peur" Cathrine Bréchignac

 

http://www.ambafrance-cn.org/N-ayons-pas-peur-de-la-science-Publie-en-chinois.html

 

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18 octobre 2012 4 18 /10 /octobre /2012 17:01

 

« Parmi les objets nouveaux qui, pendant mon séjour aux États-Unis, ont attiré mon attention, aucun n’a plus vivement frappé mes regards que l’égalité des conditions » : ainsi s’ouvre le premier tome de l’ouvrage de Tocqueville.

 

 

S’il y a des riches et des pauvres aux États-Unis, des classes et des races (voir le chapitre X, tome I : « Les trois races aux États-Unis »), néanmoins l’organisation de cette société la rapproche, jusqu’à un certain point, de l’idéal démocratique partagé par tous les peuples modernes. Non seulement, en effet, dans une démocratie, « tous les hommes concourent au gouvernement » car chacun « a un droit égal d’y concourir », mais les conditions sont aussi semblables qu’elles peuvent l’être car personne n’est prisonnier de sa condition : le serviteur peut devenir le maître, parce que le serviteur n’est pas fondamentalement différent du maître. En d’autres termes, les hiérarchies sociales sont devenues instables. Dans la société d’Ancien régime, les distinctions et les dignités étaient héréditaires et fixées, car elles correspondaient à des fonctions réservées (l’Armée, la Robe, par exemple). Dans cette société d’« ordre », chaque groupe obéissait à une loi particulière qui lui était propre. Au contraire, la société démocratique est une société sans « ordre ». La fortune circule avec une incroyable rapidité, les stratifications sociales ont des frontières floues : si certains individus se distinguent, et peuvent même connaître une ascension fulgurante, ils ne transmettent pas invariablement leur pouvoir et leur fortune à leurs enfants. La société démocratique est une société dans laquelle la supériorité se conquiert et ne se transmet pas systématiquement. Elle peut se perdre très rapidement : « Chez les peuples aristocratiques, les familles restent pendant des siècles dans le même état, et souvent dans le même lieu […] Chez les peuples démocratiques, de nouvelles familles sortent sans cesse du néant, d’autres y retombent sans cesse, et toutes celles qui demeurent changent de face ; la trame des temps se rompt à tout moment, et le vestige des générations s’efface » (Op. cit., Tome II, pp. 144-145).

En un mot, la société démocratique est une société fluide, dont les individus sont tous également souverains – gouvernants en puissance, alternativement gouvernants et gouvernés théoriquement – tous également libres, et tous foncièrement semblables. Telle est la philosophie des américains qu’a connus Tocqueville, telle est la manière dont ils se représentent eux-mêmes, conformément à l’idéal qu’ils affichent : « Nul ne différant alors de ses semblables, personne ne pourra exercer un pouvoir tyrannique ; les hommes seront parfaitement libres, parce qu’ils seront tous entièrement égaux ; et ils seront tous parfaitement égaux parce qu’ils seront entièrement libres. C’est vers cet idéal que tendent les peuples démocratiques » (Ibid., p.137). Il est clair que Tocqueville décrit ici non pas un état réel, mais la perception que les hommes ont ou, plus exactement, voudraient avoir de cet état. Si la réalité est extrêmement éloignée de cet idéal, c’est pour plusieurs raisons qui ne sont pas seulement historiques ou accidentelles, comme on voudrait le croire.

Tocqueville l’explique en effet : non seulement l’égalité rencontre certaines limites de fait (« Un peuple a beau faire des efforts, il ne parviendra pas à rendre les conditions parfaitement égales dans son sein ; et s’il avait le malheur d’arriver à ce nivellement absolu, il resterait encore l’inégalité des intelligences qui, venant directement de Dieu, échappera toujours aux lois », Ibid., p. 193), mais le mouvement même de la démocratie reconstitue les inégalités qu’elle abolit par ailleurs. Elle les reconstitue, mais sous d’autres formes. Ainsi, plus la démocratie s’étend plus l’« industrie devient aristocratique » et plus la classe ouvrière devient aliénée : « À mesure que le principe de la division du travail reçoit une application plus complète, l’ouvrier devient plus faible, plus borné plus dépendant » (Ibid., p. 222). Pendant que l’ouvrier, comme le soulignera Marx à son tour, est de plus en plus dépossédé de la signification de ce qu’il fait, le maître est obligé de « promener chaque jour ses regards sur un plus vaste ensemble, et son esprit s’étend en proportion que celui de l’autre se resserre  » (Ibid., p. 223). L’écart entre les élites et les travailleurs non qualifiés ne peut que s’étendre continuellement : « l’inégalité augmente dans la petite société [le monde industriel] , écrit Tocqueville,  en proportion qu’elle décroît dans la grande [pour la masse de la nation]  » (Ibid., p. 224).  Aujourd’hui les inégalités croissantes nées du  monde de l’entreprise cf les salaires des grands patrons),en contradiction totale avec les exigences d’égalité qui sont naturellement les nôtres à l’échelle de la société, semblent donner raison à Tocqueville.

Mais ces nouvelles formes d’inégalité sont-elles moins blessantes (dans la mesure où elles ne sont plus considérées comme une fatalité), plus tolérables (dans la mesure où elles sont aléatoires) ? Il n’est pas du tout sûr que l’égalisation théorique des conditions, qui est propre à la démocratie, nous apporte une satisfaction, un contentement ou une consolation quelconque. C’est même exactement l’inverse qui tend à se vérifier : sachant que nous avons le droit d’aspirer à une condition meilleure, que la volonté d’égalité est légitime, qu’elle nous est promise par la loi, nous sommes d’autant plus indignés par l’inégalité persistante. « Quelque démocratique que soit l’état social et la constitution politique d’un peuple, on peut donc compter que chacun de ses citoyens apercevra toujours près de soi plusieurs points qui le dominent, et l’on peut prévoir qu’il tournera obstinément ses regards de ce seul côté. Quand l’inégalité est la loi commune d’une société, les plus fortes inégalités ne frappent point l’œil ; quand tout est à peu près de niveau, les moindres inégalités blessent. C’est pour cela que le désir de l’égalité devient toujours plus insatiable à mesure que l’égalité est plus grande » (Ibid., p. 193).

Tocqueville a vu dans cette passion de l’égalité, lorsqu’elle tourne spontanément à la haine de toute différenciation et de tout talent, un risque majeur des temps modernes.

 Les démocraties sont porteuses de leur négation virtuelle, elles peuvent appeler ce que Tocqueville nomme un « despotisme nouveau », paternaliste, plus ou moins bienveillant. Dans les faits, le xxe siècle a nommé « totalitarisme » ces régimes nullement bienveillants qui ont prétendu rendre tous les sujets égaux devant un nouveau dieu nommé État (État total, bureaucratique et tentaculaire). Tocqueville avait bien vu que le totalitarisme est un produit monstrueux et logique d’une certaine passion de l’égalité, d’un amour de l’indifférenciation  de mauvais aloi. Tocqueville nous met vigoureusement en garde.Nous devons admettre que  ce n’est pas seulement l’égalité de fait qui rencontre des limites : de telles limites, conjoncturelles, provisoires, pourraient être repoussées. C’est l’exigence d’égalité totale, absolue, qui, selon Tocqueville, est problématique.

Si les États-Unis d’Amérique montrent le visage d’une société encore inégalitaire (voire  raciste), cela ne tient pas, ou pas seulement, à la particularité  de ce peuple : le rétablissement de certaines inégalités répond à une logique qui vaut pour toutes les démocraties. La question reste de trouver comment limiter ou atténuer une telle dérive, inhérente à la démocratie selon Tocqueville.

 

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18 octobre 2012 4 18 /10 /octobre /2012 16:49

 

 

 

 

 

 

 John  Stuart M~L, L'Utilitarisme, trad. G. Tanesse Ed. Garmer-Flammarion, 1968, pp. 145-146:

               

Individu ou société?

 J. S. MILL (1806-1873)

 

Philosophe et économiste ·anglais, John Stuart Mill est le défen­seur du libéralisme et de l'utilitarisme. Il présente ici l'idée selon laquelle la justice doit être établie en suivant le principe de l'utilité sociale, supérieure aux droits pourtant légitimes de l'individu.

 

Dans une société coopérative de production, est-il juste ou non que le talent ou l'habileté donnent droit à une rémunération plus élevée? Ceux qui répondent négativement à la question font valoir l'argument suivant: celui qui fait ce qu'il peut a le même mérite et ne doit pas, en toute justice, être placé dans une position d'infériorité s'il n'y a pas faute de sa part; les aptitudes supé­rieures constituent déjà des avantages plus que suffisants, par l'admiration qu'elles excitent, par l'influence personnelle qu'elles procurent, par les sources intimes de satisfaction qu'elles réservent, sans qu'il faille y ajouter une part supérieure des biens de ce monde; et la société est tenue, en toute justice, d'accorder une compensation aux moins favorisés, en raison de cette inéga­lité injustifiée d'avantages plutôt que de l'aggraver encore. À l'inverse, les autres disent: la société reçoit davantage du tra­vailleur dont le rendement est supérieur; ses services étant plus utiles, la société doit les rémunérer plus largement; une part plus grande dans le produit du travail collectif est bel et bien son œuvre; la lui refuser quand il la réclame, c'est une sorte de bri­gandage. S'il doit seulement recevoir autant que les autres, on peut seulement exiger de lui, en toute justice, qu'il produise juste autant, et qu'il ne donne qu'une quantité moindre de son temps et de ses efforts, compte tenu de son rendement supérieur. Qui déci­dera entre ces appels à des principes de justice divergents? La justice, dans le cas en question, présente deux faces entre lesquelles il est impossible d'établir l'harmonie, et les deux adversaires  ont choisi les deux faces opposées ; ce qui préoccupe l’un, c’est de déterminer, en toute justice, ce que l’individu doit recevoir ; ce qui préoccupe l’autre, c’est de déterminer, en toute justice, ce que la société doit donner.

 

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18 octobre 2012 4 18 /10 /octobre /2012 16:47

http://www.liberation.fr/politiques/2012/10/17/la-tentation-de-l-egalitarisme_853948

Extraits :

 Les français n’aiment pas les riches :

 « A leurs yeux, la richesse est foncièrement anti-démocratique, toute inégalité devient une injustice et même le talent, à lire certains, n’est que le reflet d’une anomalie de la société […]

A propos de la « refondation de l’école » selon V. Peillon :

 « La suppression hypothétique des notes, voire des redoublements, procède des mêmes préjugés . Faut-il, au nom d’un égalitarisme chimérique, couper le lien d’autorité entre l’enseignant, et l’élève, accédant au savoir ? Faut-il cesser d’encourager le mérite et d’alarmer sur les retards et les faiblesses ? »

« Et pourquoi ne pas oser se demander si justement, alors que la France a perdu six place sen deux ans au palmarès de la compétitivité, l’égalitarisme n’est pas un frein économique, culturel, donc social, la solidarité constituant au contraire l’instrument d’une promotion collective » Alain Duhamel, La tentation de l’égalitarisme, Libération 18 octobre 2012

 

 

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18 octobre 2012 4 18 /10 /octobre /2012 16:08

 

 

Pour Bachelard, l'opinion peut constituer un obstacle pour la raison, en particulier dans le domaine scientifique:

 

 

« La science, dans son besoin d'achèvement comme dans son principe, s'oppose absolument à l'opinion. S'il lui arrive, sur un point particulier, de légitimer l'opinion, c'est pour d'autres raisons que celles qui fondent l'opinion; de sorte que l'opinion a, en droit, toujours tort'.

L'opinion pense mal; elle ne pense pas: elle traduit des besoins en connaissances. En désignant les objets par leur utilité, elle s'interdit de les connaître. On ne peut rien fonder sur l'opinion: il faut d'abord la détruire. Elle est le premier obstacle à surmonter. Il ne suffirait pas, par exemple, de la rectifier sur des points particuliers, en maintenant, comme une sorte de morale provisoire, une connaissance vulgaire provisoire L'esprit scientifique  nous interdit d'avoir une opinion sur des questions que nous ne comprenons pas, sur des questions que nous ne savons-pas formuler clairement. Avant tout, il faut savoir poser des problèmes. Et quoi qu'on dise, dans la'' vie scientifique, les problèmes ne se posent pas d'eux-mêmes. C'est précisément ce sens du problème qui donne la marque du véritable esprit scientifique. Pour un esprit scientifique, toute connaissance est une réponse à une question. S'il n'y a pas eu de question, il ne peut y avoir connaissance scientifique Rien ne va de soi. Rien n'est donné. Tout est construit. »

Gaston Bachelard, La Formation de l'esprit scientifique (1938), Vrin, coll. «Bibliothèque des textes philosophiques», 1993, p. 14.

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